HistoiresItshak Nabet

Ressembler à Avraham Avinou

par Itshak Nabet

 » J’étais dans l’autobus qui me ramenait à Tibériade » raconte un Talmid Hakham qui travaille dans la diffusion de la Torah. » Lorsque nous arrivions à Afoula, un juif, d’apparence respectable, monta dans le bus. Sa démarche, sa barbe et ses vêtements témoignaient de l’importance de ce voyageur. Le véhicule était alors bondé. Pour autant, la place à côté de moi était restée vide. Ce rav s’assit et nous avons commencé à discuter de la paracha de la semaine. De fil en aiguille, nous avons échangé quelques réflexions sur le Daf à Yomi, puis sur des questions juridiques… Alors que nous nous rapprochions de notre destination, ce rav me demanda ce que je faisais dans la vie. Je lui expliquai que je m’occupais de jeunes qui étaient loin de la Torah et des Mitsvot.

Ce vieil homme se tut pendant quelques instants, le visage pensif. Puis il me confia:  » Dans peu de mois, je termine ma carrière de Dayan. (Les juges en Israël sont en fonction jusqu’à 70 ans). Mais sache que je n’ai pas toujours été comme cela … Mes parents étaient des rescapés de la Shoah. Ils n’avaient pas les forces psychiques pour me donner l’attention dont j’avais besoin. J’ai commencé à traîner dans les rues de Tel Aviv. Je n’étais pas encore Bar Mitsva que j’avais déjà touché le fond.

A côté de la maison de mes parents se trouvait un terrain vague près d’une synagogue. Nous avions l’habitude de jouer au foot avec les autres jeunes du quartier. A 15 ans, ma vie se partageait entre les matchs de foot et les bêtises. Un Chabat, nous jouions à côté de la synagogue lorsque j’envoyai le ballon très fort en sa direction. La balle termina sa course dans la tête du rabbin. Son chapeau et ses lunettes firent un vol magistral. Ce fut, pour moi et mes copains, la cerise sur le gâteau. Il ramassa ses affaires et se rapprocha de nous:
Chabat Chalom. Vous voulez nous faire le Kidouch ou vous voulez faire une partie? » lui lançai-je effrontément.

Le rav ne fut pas troublé. Il me regarda et me demanda:  » Où sont tes parents? » Je ne voulais pas lui donner mon adresse pour qu’il m’envoie la facture, et lui répondis qu’ils étaient morts.
« Viens avec moi » m’ordonna le rav. J’étais obligé de continuer à jouer le caïd et je décidai de le suivre. Nous arrivâmes à sa maison. Il fit le Kidouch et me donna à boire après lui.
 » As-tu faim? »
-Je suis mort de faim.
Le rav fit un signe à la rabanite. Celle-ci m’apporta un plat que j’ai avalé gloutonnement. Lui ne mangea presque pas. Il ne faisait que me réconforter et me dire des paroles de Torah. Lorsque je finis de manger, il me demanda si j’étais fatigué. Il m’installa dans un lit et me laissa me reposer. Quand je me réveillai, Chabat était déjà fini. Le rav me demanda ce que j’avais l’habitude de faire. Je lui dis que j’aimais aller au cinéma. Il me donna l’argent pour une séance et me dit de revenir le lendemain.

Je suis revenu le jour suivant, puis celui d’après. Chaque fois, le rav me proposa de manger et de me reposer. J’appris ensuite que douze autres jeunes, comme moi, étaient accueillis chez lui. Il commença à m’apprendre les Mitsvot, comment faire Nétilat Yadayim… Il m’acheta une paire de Téfilines. Puis m’enseigna la Torah, les Michnayottes et les lois. Grâce à lui, j’eus la chance d’aller à la Yéchiva. Je travaillai dur et passai les examens de rabbin puis de juge.  »

Le voyageur se tourna vers moi et me dit:  » Je te raconte ma vie afin que tu comprennes la chose suivante: on a parfois du mal à voir le potentiel qui se cache derrière l’effronterie et l’orgueil des jeunes en difficulté. Malgré tout, ne désespère jamais d’un de tes élèves. Tu me vois aujourd’hui comme un juge respectable, mais j’étais comme l’un de ces jeunes. Aime-les comme tes propres enfants. »
Le bus entra dans la gare de Tibériade. Avant de sortir, je lui demandai:  » Qui était ce rav?  »
Il me répondit « il s’appelle rav Ovadia Yossef. »

De tous temps, les plus grands sages de notre peuple furent tournés vers l’autre et débordaient d’amour à l’image d’Avraham avinou. Nous devons donc essayer de marcher dans leurs pas et de leur ressembler, amen ken yéhi ratson

Articles Liés

Voir Aussi
Fermer
Bouton retour en haut de la page