HistoiresItshak Nabet

La folie de « Izidor »

par Itshak Nabet

Nos sages disent que nous possédons tous une part de Pharaon en nous. L’amour de l’argent et du pouvoir peut perdre un homme dans ce monde-ci et le monde futur, comme l’illustre cette histoire du livre Sipour lé Chabat, Tu raconteras Ses merveilles volume 1:

Rav Itshak Schwarts habitait dans la ville d’Orchiva,en Roumanie, à la fin du XIXème siècle. Après s’être rempli de Torah à la Yéchiva de Presbourg, il se lança dans la production industrielle de saucisses. A cette époque, les premières usines alimentaires s’ouvraient aux Etats-Unis. Le jeune Itshak voyagea Outre Atlantique pour apprendre les secrets de ces nouvelles techniques. Ayant trouvé grâce aux yeux du patron d’une usine, il apprit en deux ans l’art et la manière de faire des saucisses. De retour en Roumanie, il décida de passer à l’acte. Il emprunta à toutes les banques le maximum d’argent en mettant en gage tous les biens que son riche beau-père lui avait offerts. Avec ces sous, il acheta un grand terrain à proximité de la ville et employa quelques dizaines d’ ouvriers. Après plusieurs semaines, la ville d’Orchiva était fière d’accueillir  » l’usine de Saucisses Schwarts « .

Le succès ne fut pas long à venir. L’entreprise devint vite une firme qui vendait ses produits dans tous le pays. Cependant, les affaires ne firent pas perdre la tête à ce bon Itshak. Il avait tout d’abord fixé un temps d’étude quotidien. Au fil du temps, il plaça un directeur et se permit d’étudier la majorité de la journée. De douces années s’écoulèrent, lorsqu’une tache de graisse entacha ce beau tableau.

Itshak eut la chance d’avoir un fils qu’il appela Réouven. Depuis tout petit, celui-ci voulait se détacher du chemin paternel. Lorsqu’il était au Talmud Torah, sa tête était dans l’usine de saucisses. Son passe-temps préféré était de traîner avec les employés en écoutant le ronron des machines.  » Je ne serai pas un fainéant comme papa. » Se répétait-il dans son cœur.  » Je ne laisserai pas mon entreprise dans les mains d’un étranger pour m’asseoir dans une maison d’étude. » Plus il grandissait plus il s’éloigna des voies de la Torah, au grand désespoir de ses parents. Il refusa d’aller à la yéchiva et c’est tout juste s’il mettait ses Téfilines. Un jour, comme on pouvait s’y attendre, il demanda à son père la permission d’épouser la fille d’un de ses employés non-juifs. Sous la pression de celui-ci qui menaça de le déshériter, il accepta cependant de se marier avec une juive.

Peu de temps après le mariage, il rejeta entièrement le joug Divin. Il changea même de nom pour devenir Izidor. Le chagrin de son père grandissait avec les années, jusqu’au jour où on lui annonça que son fils avait mangé dans un restaurant taref le jour de Yom Kippour. Son cœur ne supporta pas la mauvaise nouvelle et, le jour même, il fut enterré dans l’ancien cimetière d’Orchiva. Après la semaine de deuil, l’usine changea de visage. Izidor renvoya le directeur et les employés religieux. La saucisse Schwarts qui était réputée pour sa cacherout fut remplacée par une andouillette de porc.

Les années passèrent et, en 1910, un jeune rav arriva à Orchiva:Rav Yoel Teitelbaum zal qui deviendra par la suite l’admour de Satmar. Alors âgé de 24 ans, le rav essaya tout de suite de diffuser une ambiance de Torah. Il ouvrit une Yéchiva et commença à former des étudiants. Il lutta pour défendre chaque loi dans une ville majoritairement réformée. A cette époque, Izidor maria son fils aîné. La rumeur courut qu’il y aurait des danses mixtes pendant la soirée. Le rav annonça à la synagogue qu’il était hors de question qu’une telle fête ait lieu dans la ville. Les gens attendaient le mariage pour voir le rav baisser la tête face au riche Izidor.

Au début de la soirée, on annonça au rabbin que la fête avait débuté avec des danses mixtes. Rav Yoel ferma sa guémara en laissant échapper un long soupir. Il mit son manteau et partit accompagné de deux élèves. Un silence s’installa dans la salle lorsque le rav arriva. Les chants et les danses s’arrêtèrent d’eux- mêmes. Il s’approcha des tables et exclama d’une voix puissante:  » C’est une grave interdiction de la Torah de danser entre hommes et femmes. Tout celui qui dansera en paiera le prix fort! »

En une seconde, toutes les rondes se décomposèrent. Le père du marié, rouge de colère, se précipita vers le rav:  » Tu es venu pour casser ma fête? Je veux coûte que coûte qu’il y ait des danses mixtes ici!  »
-Je ne laisserai pas faire une chose pareille, il en est hors de question!
-Ce ne sont pas des rabbins fanatiques qui nous diront quoi faire. Dit Izidor. « Continuez à danser », cria-t-il aux invités.
-Si tu n’écoutes pas ce que je te dis, sache que tu le paieras le prix fort.
-Et peux-tu me dire ce qui m’arrivera?
Le rav le regarda d’un regard glacé et déclama: « Tu seras broyé. »
-Vous avez entendu, s’écria Izidor en riant, vous avez entendu ce qu’a dit le rav, je serai broyé…
Les rires éclatèrent dans toute la salle, et les invités se remirent à danser.

Le lendemain, au petit matin, Izidor se leva à l’aube comme chaque jour. Malgré le peu d’heures de sommeil, il désirait surveiller son usine. Dans la précipitation, il revêtit le costume de fête qu’il porta au mariage. Lorsqu’il débarqua à l’usine, les ouvriers qui ne pensaient pas le voir si tôt discutaient et n’avaient pas allumé les machines.
-Tous les travailleurs aux machines! Cria Izidor en colère.

Le visage plein de haine, il se dirigea vers la machine à broyer la viande et appuya sur le bouton. Les énormes lames commencèrent à tourner. Izidor secoua l’ouvrier qui devait faire passer la viande afin qu’il s’active. L’homme qui vit les couteaux tourner près de lui eut peur et attrapa le bras du directeur. Izidor vit sur son costume neuf la tache de sang et de graisse engendrée par son employé. Fou de rage, il commença à pousser celui-ci vers la machine. Ne sachant plus quoi faire pour sauver sa peau, le travailleur attrapa son patron et le projeta à l’intérieur de la broyeuse. Un hurlement terrible se fit entendre. Les ouvriers observèrent comment leur patron se transforma en chair à saucisse.

 » Le rav lui avait dit qu’il serait broyé s’il continuait à danser » murmuraient les gens pendant l’enterrement.  » Le rav est un saint homme. » La nouvelle se répandit dans toute la région. Le rav Yoel Taëtellbaum zal fut le rav d’Orchiva pendant 14 ans et laissa une communauté juive florissante.

Mes chers amis, tirons les leçons de cette paracha. N’attendons pas les coups de bâton pour reconnaître la vérité et pour abandonner nos mauvais penchants. Profitons de ces semaines pour sortir d’Egypte et pour noyer le Pharaon qui sommeille en nous. Qu’Hachem déverse sur nous une pluie de miséricorde et qu’Il nous aide à nous purifier, amen ken yéhi ratson.

Articles Liés

Voir Aussi
Fermer
Bouton retour en haut de la page