HistoiresItshak Nabet

Une mission en Sibérie

Au début du vingtième siècle, les Russes et les Japonais entrèrent en guerre en extrême-orient . Pour remporter la bataille, le Tsar de Russie enrôla tous les Polonais de 21 ans pour quatre ans d’armée. La plupart de ces soldats furent envoyés sur le front et ne retrouvèrent jamais leur famille et leur pays. Les milliers de jeunes juifs ne furent pas épargnés par ce nouveau décret. Pour les parents et ces jeunes gens, être soldat russe signifiait vivre comme un non-juif pendant quatre ans. Ainsi, chaque jour, des dizaines de jeunes hommes se présentaient chez le Sfat Emet, l’admour de Gour, avec la même requête:  » Bénissez-nous pour être exemptés de l’armée ».

Le rav avait plusieurs réponses. S’il répondait:  » Prenez sur vous le joug de la Torah et vous serez libéré du joug royal, » cela signifiait qu’il y avait encore une petite chance. Si le jeune homme prenait sur lui d’étudier jour et nuit dans les mêmes conditions que les soldats russes, et s’il priait avec de nombreuses larmes, il pouvait espérer encore une permission. Les plus Tsadik d’entre eux avaient le mérite d’entendre:  » Tu n’as pas à t’inquiéter, tu ne feras pas l’armée. »

Un des jeunes Hassid de Gour, Haïm Chlomo, était sûr d’entendre de la bouche de son Rabi qu’il ne combattrait pas. Cependant, la réponse ne fut pas celle -ci:  » Si tu veux m’écouter,mon ami, apprends le métier de Mohel. » Haïm Chlomo sortit brisé de cette rencontre. Une chose était certaine: il serait enrôlé. Il demanda à des Mohalim réputés de lui apprendre l’art de la Brit Mila. En quelques mois, il connut parfaitement son métier.

La première étape de cette descente aux enfers fut la visite médicale à Varsovie. Les mots des médecins de l’armée résonnaient encore dans les oreilles de Haïm:  » M. Salomon, vous êtes apte à servir dans l’armée de notre majesté. » Après, tout s’accéléra. Il quitta sa famille, son Rabi et ses amis. Il emballa ses vêtements, ses outils de Mohel, un peu de pain et de médicaments, et le voilà parti pour la Sibérie.

Après de nombreux jours de voyage, le train s’arrêta:  » Tout le monde descend, bienvenue au Paradis. » Les portes du wagon s’ouvrirent sur un désert de neige. A plusieurs milliers de kilomètres de la moindre habitation, les soldats frappés par le froid quittèrent les wagons. Ce camp militaire représentait la dernière station avant de se rendre sur le front japonais.

Alors que les soldats prenaient leur repas dans le réfectoire, le général, responsable de la base fit son apparition. Il fit signe au chef du groupe de venir. Après quelques instants, celui-ci s’approcha du régiment et demanda:  » Y a-t-il un soldat juif parmi vous?  » Des centaines de regards se posèrent sur Haïm Chlomo.  » Dépêche-toi, le général Fiodorof veut de parler. »

Haïm Chlomo se rendit à pas rapides chez le responsable de la base.  » Ce que je vais te dire doit rester strictement confidentiel. Si tu en parles, il risque de t’arriver malheur, tu comprends? »

« Bien sûr mon général! »

« Voila, il y a quelques semaines, ma femme a mis au monde un enfant. Après une semaine, elle commença à voir en rêve son père tous les soirs. Celui-ci, qui était juif religieux, la hante et lui répète:  » Ma fille, cet enfant est juif. Tu dois lui faire la Brit Mila. » Au début, ma femme ne faisait pas cas de ces étranges apparitions. Puis elle commença à prendre cela au sérieux. Et elle me demanda de trouver un Mohel. J’ai eu beau lui expliquer qu’il n’y avait pas de juif dans ce désert de neige, ce matin elle perdit la raison et cria:  » Si tu ne trouves pas quelqu’un, tu ne rentres pas à la maison!! » Dis moi, soldat Haïm, est-ce que tu sais quoi faire? »

En un instant, Haïm comprit ce qui lui valut ce voyage en Sibérie et les paroles du Rabi. Toutes ces péripéties afin de rentrer ce petit bébé dans l’alliance d’Avraham avinou.  » Je suis spécialiste des Brit Mila. » Quelques heures plus tard, l’enfant était circoncis. Les pleurs de cette mère arrivèrent presque à réchauffer le cœur de ce général russe.  » Combien te dois-je pour cela ? » demanda le général.

« Je ne désire qu’une seule chose, repartir chez moi pour servir mon Créateur. » Quelques jours plus tard, Haïm Chlomo reçut sa lettre de libération. Il rentra chez lui et alla remercier son rav, le Sfat Emet. Celui-ci lui confia:  » Il faut parfois voyager à l’autre bout du globe pour réparer l’âme d’un juif. Désormais tu as fini ta mission dans l’armée. »

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